ESPACE (CONQUÊTE DE L’) - Les premiers programmes spatiaux

ESPACE (CONQUÊTE DE L’) - Les premiers programmes spatiaux
ESPACE (CONQUÊTE DE L’) - Les premiers programmes spatiaux

La recherche scientifique, l’exploration de l’inconnu et la mise au point de la survie de l’homme dans l’espace furent les buts principaux des premiers programmes spatiaux nationaux. Cependant, de plus en plus, on a mis en service des satellites d’applications qui présentent un intérêt économique direct. Les satellites à usage terrestre servent les besoins de l’homme dans de nombreux domaines (météorologie, télécommunications, géodésie et cartographie, agriculture, relevé des ressources terrestres, etc.). À cette époque, à l’exception des photographies prises par les astronautes, toutes les autres tâches ont été remplies sans que la présence de l’homme fût nécessaire à bord de tels satellites. Avec la mise en orbite de stations semi-permanentes, les États vont conduire et poursuivre de nombreuses opérations de surveillance de nature civile et militaire.

1. Vols automatiques

Fusées-sondes

Au cours de la décennie suivant la fin de la Seconde Guerre mondiale, les fusées-sondes ont permis de faire d’intéressantes études de la haute atmosphère. Quelques-unes ont atteint des altitudes qu’on peut considérer comme celles de l’espace. Bien que les vols de satellites et de sondes spatiales aient considérablement évolué depuis 1957, les programmes de fusées-sondes sont toujours poursuivis. Cette technique est la seule méthode pour obtenir des renseignements sur l’atmosphère dans toute son épaisseur et en un temps très court. En outre, d’importantes observations de la haute atmosphère (entre 100 et 160 km) ne sont possibles qu’avec ce genre de fusées dont on a amélioré la fiabilité et augmenté la charge utile emportée.

Satellites scientifiques

Une grande variété de satellites, terrestres et solaires, ont été lancés à partir de 1957 en vue d’étudier les radiations solaires et l’environnement spatial (tabl. 1) et d’accroître notre connaissance des forces agissant sur la Terre et des causes des phénomènes naturels qui affectent directement les conditions de vie de l’homme, l’agriculture, l’économie, etc.

Les premiers satellites lancés par l’Union soviétique (Spoutnik-1) et les États-Unis (Explorer-1) étaient tout à fait simples, servant surtout à prouver la validité du système de lancement et fournissant un radiophare en mouvement. Explorer-1, cependant, avait à son bord un compteur de radiation. Les renseignements envoyés du vaisseau par télémesure, et confirmés par un enregistreur transporté par Explorer-2, furent à la base de la découverte des ceintures de radiation de Van Allen. Ces ceintures en forme de tores, dans lesquelles des particules sub-atomiques sont piégées, portent le nom du savant qui en a développé l’instrumentation et la théorie.

Typique de la classe des satellites de recherche fut la série O.S.O. (Orbiting Solar Observatory), destinée à observer les phénomènes solaires et mesurer les radiations solaires. Huit satellites furent lancés avec succès entre 1962 et 1975. Un autre fut endommagé par un accident. L’I.M.P. (Interplanetary Monitoring Platform) était un satellite de 63 kilogrammes placé sur une orbite terrestre très elliptique (périgée: 222 km; apogée: 197 700 km). La période de cette orbite inhabituelle est d’environ quatre jours. Le but était l’étude des radiations interplanétaires et des champs magnétiques dans l’espace. Trois satellites de cette série ont été lancés.

Après un premier échec de lancement, un observatoire astronomique orbital (O.A.O.) fut mis sur orbite et à l’aide de trois satellites lancés de 1967 à 1972, fournit des renseignements sur le milieu interstellaire, les étoiles lointaines et étudia le rayonnement ultraviolet.

Programmes lunaires

Les États-Unis et l’U.R.S.S. ont tous deux poursuivi des programmes d’étude lunaire et planétaire (tabl. 1). La première, l’U.R.S.S., photographia la face cachée de la Lune en 1959, puis réussit l’atterrissage en douceur d’un vaisseau automatique qui envoya à la Terre des photographies du sol lunaire environnant. Les États-Unis développèrent la série des vaisseaux Ranger, qui transmirent, avant de s’écraser, des photographies de la Lune, prises pendant la dernière partie de leur vol. Une série de cinq Lunar Orbiter firent un relevé et dressèrent une carte de toute la surface lunaire, à l’exception d’une faible partie de la région polaire. Le but principal du programme était d’obtenir des renseignements permettant de choisir des lieux d’atterrissage pour la réalisation du programme Apollo. Le programme Surveyor permit de faire atterrir sur la Lune cinq véhicules (sur sept essais). Equipés de caméras de télévision, les Surveyor transmirent des milliers de photographies. Quelques Surveyor emportaient une petite excavatrice montée sur un bras extensible capable de prélever des échantillons du sol lunaire en vue de déterminer les caractéristiques physiques et de résistance de charge de la surface lunaire, informations importantes pour la conception et la construction du module lunaire (L.M.) qui devait amener deux hommes sur la Lune. Deux Surveyor avaient aussi à leur bord un appareil à rayons alpha, qui donnait une estimation grossière de la composition chimique du sol lunaire.

Programmes planétaires

Le programme américain Mariner englobait les sondes interplanétaires destinées à passer près de Mars ou de Vénus (tabl. 1). Mariner-2 (1962) et Mariner-5 (1967) passèrent à moins de 35 000 km de Vénus et mesurèrent la température et la densité de l’atmosphère. Mariner-10, lancée en 1973, passa à moins de 6 000 km et poursuivit son vol en direction de Mercure. Mariner-4 (1964), Mariner-6, Mariner-7 (1969) et Mariner-9 (1971) donnèrent des photographies remarquables de la surface de Mars et procédèrent à des analyses de l’atmosphère de cette planète. Mariner-6 et Mariner-7 permirent de dresser, grâce à leurs radiomètres à infrarouges, des cartes thermiques de Mars. Les missions de Mariner-1, Mariner-3 et Mariner-8 furent des échecs.

L’Union soviétique fit de nombreux essais de lancement de vaisseaux spatiaux vers Mars et Vénus (tabl. 1), dont certains avec succès, comme Venus-4 (1967), Venus-5 et Venus-6 (1969), les sondes Venera et Mars-5, Mars-6 et Mars-7. Lors de chacun de ces vols, une capsule contenant des instruments descendit en parachute dans l’atmosphère brûlante de Vénus. Les renseignements recueillis furent apparemment à chaque fois incomplets, par suite de quelque défaillance partielle.

2. Vols spatiaux de vaisseaux habités

Programmes initiaux

Un des buts communs aux programmes spatiaux américains et soviétiques a été la réalisation de vols orbitaux habités (tabl. 2). Les deux nations ont fondé leur projet sur l’utilisation comme véhicules de lancement de missiles balistiques. Les missiles soviétiques ayant été conçus pour l’envoi d’ogives armées plus lourdes, leurs premiers vaisseaux habités dépassèrent en poids leurs homologues américains. Le vaisseau soviétique Vostok pesait presque 5 tonnes, tandis que le Mercury américain atteignait 1,5 tonne.

Vols soviétiques

Le 12 avril 1961, Youri Gagarine fut le premier homme à effectuer un vol orbital autour de la Terre. Dans son vaisseau Vostok-1, lancé de Baïkonour (U.R.S.S.), il accomplit une révolution orbitale complète.

Le 6 août 1961, Guerman Titov accomplit dix-sept révolutions, à bord de Vostok-2, en un vol de vingt-cinq heures.

La durée de vol en apesanteur fut ensuite prolongée, lors d’un vol « groupé », par Adrian Nikolaïev et Pavel Popovitch. Le vaisseau où avait pris place Nicolaïev fut lancé le 11 août 1962 et celui qui transportait Popovitch fut mis sur une orbite presque identique un jour plus tard. Tous deux demeurèrent en orbite jusqu’au 15 août, Nicolaïev accomplissant soixante-quatre révolutions et Popovitch quarante-huit. Les deux véhicules se rapprochèrent à un moment jusqu’à être à 8 km l’un de l’autre, mais étaient distants de plus de 1 600 km lors de leur rentrée dans l’atmosphère.

Un second vol groupé eut lieu l’année suivante. Le 14 juin 1963, Vostok-5 fut lancé, emportant Valery Bykovski. Deux jours plus tard, Vostok-6 était placé sur orbite ayant à son bord Valentina Terechkova, la première femme cosmonaute. Les deux vaisseaux revinrent sur la terre le 19 juin, après avoir accompli, respectivement, quatre-vingt-une et quarante-huit révolutions. Aucune tentative de rendez-vous spatial ne fut effectuée au cours de ces vols groupés.

Vols américains

Le premier en date des vols orbitaux habités américains eut lieu le 20 février 1962, lorsque John H. Glenn accomplit trois révolutions à bord du vaisseau Friendship-7 de la série Mercury. M. Scott Carpenter effectua un vol similaire le 24 mai 1962 et Walter M. Schirra réussit un vol de six révolutions le 3 octobre 1962. Le dernier vol de la série Mercury fut celui de L. Gordon Cooper dont le vaisseau tourna vingt-deux fois autour de la Terre, les 15 et 16 mai 1963.

Gemini

Tout en faisant la démonstration des possibilités d’adaptation de l’homme aux conditions de vie dans l’espace, le programme des vols Mercury et Vostok était trop limité pour permettre le développement de la capacité opérationnelle dans le vol spatial habité. Aux États-Unis, le projet Gemini fut destiné à accomplir la seconde étape du programme entrepris par Mercury.

Le projet Gemini comprenait deux objectifs principaux: prolonger la durée de vol à deux semaines et mettre au point la technique du rendez-vous spatial. La capsule biplace Gemini ressemble à Mercury, en un peu plus grand, mais son poids est plus que doublé. Gemini n’est pas équipé, comme Mercury, d’une fusée d’évasion, mais comporte des sièges éjectables en cas d’urgence. Cela est rendu possible par l’utilisation comme lanceur de la fusée Titan II, qui emploie des propulseurs hypergoliques solides dont le danger d’explosion est moindre que celui de l’oxygène liquide et du kérosène utilisés par les fusées Atlas.

Manœuvres de rendez-vous

Dans une mission de rendez-vous spatial effectuée par une capsule Gemini, le véhicule « cible » est placé le premier sur orbite. La cible peut être constituée par un étage Agena ou encore par un véhicule passif d’arrimage, mis sur orbite par un véhicule de lancement Atlas. (La cible peut être également un autre vaisseau Gemini habité.) Un certain temps après son lancement, la cible repasse au-dessus du site du lancement. Par exemple, si la période orbitale d’Agena est de 90 min, il repassera au-dessus du site de lancement seize révolutions orbitales ou vingt-quatre heures plus tard, lorsque la Terre aura accompli une rotation complète. Si la capsule Gemini est lancée à l’instant convenable, elle peut théoriquement être mise sur une orbite identique à celle d’Agena, la cible et la capsule volant à proximité l’une de l’autre. Dans ces conditions idéales, les pilotes n’auraient que de petites manœuvres à effectuer, en utilisant leurs fusées, pour réaliser la jonction des deux véhicules.

Pour beaucoup de raisons, ces conditions ne sont pas toujours réunies dans la pratique. Tout d’abord, il peut être difficile de lancer le vaisseau exactement à l’instant propice. Un retard d’une seconde permet à la cible de dépasser de 8 km le lieu de rendez-vous. En second lieu, le système de guidage du véhicule de lancement ne permet pas, malgré sa très grande précision, de placer Gemini sur l’orbite exacte d’Agena (une erreur de 0,01 p. 100 sur la vitesse de séparation entraîne un décalage de hauteur de près de 2 km, une demi-révolution après mise sur orbite). Dans les conditions réelles, l’instant du lancement est donc encadré par une « fenêtre de lancement » de plusieurs minutes. Le rattrapage d’Agena et les différents ajustements orbitaux sont accomplis en vol au moyen des systèmes de propulsion individuels de Gemini ou d’Agena.

Si les deux vaisseaux occupent le même plan orbital et sont simplement décalés en phase (passant au même point en des instants différents), les corrections requises peuvent être effectuées sans grande dépense de combustible. Dans ce cas, l’un des vaisseaux est placé sur une orbite allongée, de période plus longue; l’autre vaisseau, sur son orbite de période plus courte, dépasse alors le premier. La première orbite est alors raccourcie, après que la distance entre les deux vaisseaux a été réduite. Ces modifications requièrent une propulsion relativement minime.

Si les deux orbites occupent des plans différents, les manœuvres de correction sont plus difficiles. Pour un changement de plan d’angle 見, un accroissement de vitesse égal à 2 V sin ( 見/2) est requis, V étant la vitesse du satellite. Ainsi, une modification de plan égale à 50 exige un gain de vitesse de 700 m/s, tandis que pour 600, il faudrait un gain de vitesse égal à la vitesse du satellite (environ 8 000 m/s). Même avec une propulsion par fusée Agena, seuls des changements de plan minimes sont réalisables pour Gemini.

La manœuvre de rendez-vous complète comprend les étapes suivantes: lancement à l’intérieur d’une « fenêtre » temporelle définie, changement de plan, changement de phase, rendez-vous et amarrage.

Vols

Le 23 mars 1965, Virgil I. Grissom et John W. Young accomplirent le premier vol de Gemini habité, en trois révolutions orbitales. Le deuxième vol Gemini, une mission de quatre jours, eut lieu en juin 1965, avec les astronautes James A. McDivitt et Edward H. White. White quitta le vaisseau pendant vingt minutes environ, au cours de la troisième révolution orbitale, et put se mouvoir librement dans l’espace, à l’extrémité d’un cordon de 8 mètres de long qui le rattachait à la cabine. En août 1965, L. Gordon Cooper et Charles Conrad tournèrent autour de la Terre pendant huit jours, au cours du troisième vol Gemini.

Les deux objectifs majeurs du projet Gemini furent atteints en décembre 1965, avec le vol des astronautes Frank Borman et James A. Lovell. Ce vol débuta le 4 décembre et se poursuivit durant trois cent trente heures (près de deux semaines). Au onzième jour de la mission Borman-Lovell sur Gemini-7, les astronautes Walter M. Schirra et Thomas P. Stafford furent lancés à bord de Gemini-6 et réalisèrent le rendez-vous avec Gemini-7. Les vaisseaux accomplirent plusieurs révolutions orbitales en formation, avant le retour à terre de Gemini-6, le 16 décembre, et de Gemini-7, le 18 décembre.

En mars 1966, les astronautes Neil A. Armstrong et David R. Scott accomplirent la même manœuvre avec une fusée Agena sans équipage. Après rendez-vous, ils s’amarrèrent solidement à Agena. Un court-circuit se produisit alors dans l’un des vaisseaux, les obligeant à interrompre le vol. Les pilotes réussirent néanmoins à effectuer une rentrée précise dans l’atmosphère et amerrirent en vue d’un des avions de récupération.

Les astronautes Stafford et Eugene A. Cernan prirent part à la troisième mission de rendez-vous, sur Gemini-9, en juin 1966. Ils firent progresser la manœuvrabilité en réalisant trois fois la jonction des véhicules. Cernan sortit de sa capsule et effectua des manipulations externes durant plus de deux heures.

Au mois de juillet 1966, John W. Young et Michael Collins menèrent à bien la mission complexe de Gemini-10 qui comprenait: le rendez-vous et l’amarrage avec une fusée Agena; l’utilisation de la propulsion d’Agena pour élever l’orbite à une altitude de 760 km; le rendez-vous avec une fusée Agena placée sur orbite durant la mission de Gemini-8; enfin la sortie dans l’espace pour récupérer, sur cette fusée, les résultats d’une expérience faite sur l’impact des micrométéorites.

Au mois de septembre 1966, Conrad et Richard F. Gordon amarrèrent la capsule Gemini-11, dès sa première révolution orbitale, à une fusée Agena inhabitée. Utilisant la propulsion d’Agena, Gemini-11 s’éleva avec celle-ci à l’altitude d’environ 1 400 km. Sortant de la capsule durant quarante cinq minutes, Gordon relia les deux vaisseaux par un câble. Conrad utilisa ensuite le câble pour faire tourner Gemini autour d’Agena en position stationnaire, produisant ainsi une pesanteur artificielle. Les astronautes James A. Lovell et Edwin E. Aldrin accomplirent la dernière mission de la série sur Gemini-12, en novembre 1966. Le vol comprit le rendez-vous et l’amarrage avec une fusée Agena, deux phases d’activité hors véhicule, une phase de manœuvre stationnaire d’encâblage et un amerrissage de précision, à moins de six kilomètres du point prévu.

Résultats

L’expérience acquise au cours des vols Gemini comporte: 1 940 heures de vol spatial humain; des vols de longue durée; l’accomplissement de manœuvres de précision qui permirent notamment la réalisation de dix rendez-vous dans l’espace en utilisant sept méthodes différentes; le maintien des deux vaisseaux en position relative stationnaire, avec et sans câble; neuf exercices d’amarrage avec un autre véhicule, quatre périodes d’activité hors des véhicules, totalisant 12 h 35 mn; un record d’altitude atteint à 1 400 km; enfin des retours sur Terre à la précision contrôlée, effectués à moins de sept milles marins du point prévu, pour les sept derniers vols. Les astronautes effectuèrent également quarante expériences de caractère scientifique, technologique et médical. Les vols Gemini démontrèrent que l’homme pouvait vivre et travailler dans l’apesanteur durant quatorze jours au moins et se réadapter ensuite au champ de gravitation terrestre.

Voskhod et Soyouz

Le premier vol spatial soviétique multiplace eut lieu le 12 octobre 1964, sur Voskhod-1 qui accomplit seize révolutions orbitales. Commandé par le pilote Vladimir Komarov, l’équipage comprenait l’ingénieur physicien Constantin Feoktistov et le médecin Boris Yegorov. L’équipage portait durant le vol des vêtements ordinaires, de préférence aux combinaisons spatiales. Un système d’atterrissage comportant des parachutes et des fusées de freinage permit au vaisseau et à ses occupants d’atterrir sur la terre ferme. Voskhod-2, véhicule biplace piloté par Pavel Beliaev, fut lancé le 18 mars 1965. C’est durant ce vol qu’Alexis Leonov, copilote, effectua une brève sortie hors du vaisseau et fut ainsi le premier homme à flotter librement dans l’espace.

En avril 1967, l’Union soviétique lançait Soyouz-1, qui devait être le plus grand et le plus complexe des vaisseaux lancés à ce jour. Cependant, le pilote, Vladimir Komarov, rencontra des difficultés dès le début du vol. Il tenta l’atterrissage au cours de la dix-huitième révolution, mais le vaisseau se prit dans les cordes du parachute et s’écrasa au sol en Asie centrale. Komarov fut tué, devenant ainsi la première victime connue de la conquête de l’espace.

En octobre 1968, le cosmonaute G. Beregevoi, pilotant Soyouz-3, exécuta plusieurs fois des manœuvres de rendez-vous avec Soyouz-2 inhabité, qui avait été mis sur orbite un jour plus tôt. Au début de 1969, Soyouz-4 était lancé avec le cosmonaute V. A. Chatalov à bord. Le lendemain, Soyouz-5 décollait, emportant trois cosmonautes: B. Volinov, Y. Khrunov et A. Eliseev. Après rendez-vous et amarrage, Khrunov et Eliseev quittèrent leur vaisseau et, après une heure dans l’espace, passèrent dans Soyouz-4, désarrimèrent les deux vaisseaux, rentrèrent dans l’atmosphère et atterrirent sains et saufs.

Le 11 octobre 1969, l’Union soviétique lançait dans l’espace Soyouz-6, avec deux hommes à bord: le cosmonaute Gueorgui Chonine et l’ingénieur Valery Kubarov. Le 12 octobre, Soyouz-7, emportant Anatoli Filipchenko, Vladislav Volkov et Victor Gorbatko, était lancé et mis sur une orbite voisine de celle de Soyouz-6. Le 13 octobre, un autre vaisseau, Soyouz-8, avec deux hommes à son bord (Vladimir Chatalov et Alexis Eliseev) rejoignait les deux précédents. Pour la première fois, on assistait à un vol groupé de trois vaisseaux spatiaux. Soyouz-6 revenait sur la Terre le 16 octobre, après plusieurs essais de soudure de métaux dans le vide. Soyouz-7 et Soyouz-8 le suivaient à un jour d’intervalle chacun. La mission était de préparer la construction d’une plate-forme spatiale permanente, par exemple Saliout-6, à partir de laquelle des cosmonautes mèneraient des activités continues de recherche scientifique, d’observation et de surveillance de la Terre. Le vaisseau Soyouz permet des manœuvres dans l’espace et comprend une capsule de descente abritant les membres de l’équipage.

Programme Apollo

Les États-Unis annoncèrent en mai 1961 leur intention de faire atterrir sur la Lune un vaisseau spatial habité avant 1970. Ce programme prit le nom d’Apollo.

Principes

Plusieurs techniques différentes, applicables aux missions lunaires, furent mises à l’étude. La première méthode, ou méthode directe , utilise un seul véhicule géant de lancement (Nova) qui envoie le vaisseau spatial vers la Lune. À l’approche de la Lune, celui-ci est ralenti par son propre système propulseur, appelé étage d’atterrissage lunaire. Un autre système de propulsion, l’étage de décollage lunaire, libère le vaisseau de l’attraction lunaire et le place sur sa trajectoire de retour vers la Terre.

Une deuxième conception, dite méthode du rendez-vous terrestre , diffère de la méthode directe par l’emploi de deux véhicules de lancement plus petits, qui placent séparément deux portions du vaisseau (l’étage d’atterrissage lunaire d’une part, et l’étage de décollage lunaire avec le vaisseau proprement dit, d’autre part) sur une orbite terrestre. Elles sont alors réunies et propulsées ensemble vers la Lune.

La troisième méthode est celle du rendez-vous lunaire . Un véhicule unique de lancement, Saturn V, place le vaisseau Apollo, pesant cinquante tonnes, avec trois hommes à bord, sur une trajectoire lunaire. Environ deux jours et demi plus tard, tandis que le vaisseau approche de la Lune, son propre système de propulsion le met en orbite autour du satellite de la Terre. Puis un élément du vaisseau spatial, appelé module lunaire (L.M.), se sépare du véhicule principal, emmenant deux hommes à son bord. Ces derniers pilotent alors le L.M. vers la Lune, tandis que le troisième astronaute tourne en orbite lunaire dans l’autre élément du vaisseau, appelé module de commande. Après avoir posé le L.M. « en douceur », les deux astronautes se livrent à des observations scientifiques et récoltent des échantillons géologiques. Vingt-quatre heures plus tard environ, ils décollent et réalisent le rendez-vous spatial avec le module de commande en orbite. Après le rendez-vous, la propulsion du vaisseau le fait sortir de l’orbite lunaire et le renvoie vers la Terre. Un guidage et un contrôle précis de la trajectoire de retour permettent de faire passer le vaisseau par un étroit « couloir de rentrée ». Ce couloir, de 40 km de hauteur environ, est limité, vers le bas, par la trop grande densité atmosphérique qui obligerait le module à dépasser les limites de décélération tolérable et, vers le haut, par une atmosphère trop ténue pour que le vaisseau soit « capturé » et puisse rentrer. Dans l’atmosphère, le module de commande d’Apollo ne dispose que d’une marge de manœuvre limitée. Bien que sa finesse aérodynamique (rapport portance/traînée) soit de 0,28, le couloir de rentrée n’aura pas moins de 1 600 km de long sur 320 km de large, du fait de la vitesse élevée de rentrée dans l’atmosphère.

Premiers vols

Le premier vol d’Apollo habité, en orbite terrestre, devait avoir lieu en février 1967. Le 27 janvier 1967, durant une répétition du compte-à-rebours, un incendie se déclara à l’intérieur de la cabine du vaisseau spatial et, dans l’atmosphère d’oxygène concentré à la pression atmosphérique, s’étendit rapidement. Les astronautes Virgil L. Grissom, Edward H. White et Roger B. Chaffee périrent, après avoir tenté, sans succès, de quitter la cabine. L’accident retarda considérablement la poursuite du programme Apollo. Cependant, en novembre 1967, une fusée Saturn V plaça sur orbite un vaisseau Apollo automatique.

Deux autres vols Apollo sans passager eurent lieu. Le 11 octobre 1968, Apollo-7 fut placé en orbite autour de la Terre avec à son bord les trois astronautes Walter P. Schirra, Donn F. Eisele et R. Walter Cunningham. Le fonctionnement du module de commande fut vérifié pendant le vol, qui dura le temps de cent soixante-trois périodes. Apollo-8, ayant à son bord F. Borman, J. A. Lovell et W. A. Anders, fut lancé le 21 décembre 1968. Après insertion sur une orbite terrestre, Apollo-8 fut placé sur une trajectoire translunaire, puis mis en orbite lunaire pour dix révolutions, et revint sans dommage sur la Terre. Des millions de téléspectateurs dans le monde purent regarder en direct les images transmises pendant le vol vers la Lune et à partir de l’orbite lunaire.

Apollo-9, piloté par McDivitt, D. Scott et R. Schweickart, fut lancé le 3 mars 1969, pour un vol de dix jours. Il permit de vérifier le fonctionnement du module lunaire en orbite terrestre. Apollo-10 mit le point final aux préparatifs de débarquement lunaire. Piloté par T. Stafford, E. Cernan et J. W. Young, il partit le 18 mai. Répétant le vol d’Apollo-8, après mise en orbite lunaire, Stafford et Cernan passèrent dans le L.M. et abaissèrent leur orbite à 15 000 mètres au-dessus de la Lune. Après un rendez-vous réussi avec le module de commande, le retour se fit sans problème, et l’amerrissage eut lieu le 26 mai.

Apollo-11

Apollo-11 fut lancé le 16 juillet 1969. Il était piloté par Neil A. Armstrong, Edwin E. Aldrin et Michael Collins. Après un vol analogue à celui d’Apollo-10 jusqu’à la mise en orbite lunaire, Armstrong et Aldrin passèrent dans le L.M., laissant Collins dans le module de commande. La descente eut lieu, et l’atterrissage sur la Lune se fit le 20 juillet par 230 5 de longitude E. et 00 64 de latitude N. Tandis que des millions de personnes regardaient l’événement à la télévision, Armstrong, dans son volumineux scaphandre spatial, descendit l’escalier du L.M. et posa le pied sur la Lune. Ses premières paroles furent alors: « C’est un petit pas pour un homme, mais un bond de géant pour l’humanité. » Il indiqua que ses chaussures s’étaient enfoncées d’environ trois millimètres dans la poudre fine de la surface lunaire. Aldrin rejoignit Armstrong, et ensemble ils passèrent près de deux heures à prendre des photographies, à ramasser environ trente kilogrammes d’échantillons de sol lunaire (y compris deux carottes témoins), à planter un drapeau américain, à mettre en place une expérience sur le vent solaire, un sismographe et un réflecteur de rayon laser. Ils marchèrent et coururent sur la Lune où règne une gravité six fois plus faible que sur la Terre. Une caméra de télévision, placée à quelque distance du module lunaire, transmettait les images à la Terre. Pendant qu’ils étaient sur la Lune, le président Richard M. Nixon félicita les astronautes par téléphone.

Rentrés dans le L.M. et s’étant débarrassés de leurs scaphandres spatiaux, les astronautes décollèrent le 21 juillet, après être restés 21 h 36 mn à la surface de la Lune. La montée, le rendez-vous et l’amarrage avec le module de commande resté sur orbite lunaire se déroulèrent sans incident. Les astronautes passèrent dans le module de commande, la mise sur orbite de transfert eut lieu, et l’amerrissage dans le Pacifique se produisit le 24 juillet.

À cause de la possibilité, si infime soit-elle, d’existence sur la Lune d’organismes vivants, dont les effets sur la vie terrestre seraient inconnus, un système compliqué de décontamination et d’isolement fut employé après le retour des astronautes pendant trois semaines.

Apollo-12

Apollo-12 répéta le vol d’Apollo-11 avec, cependant, quelques différences intéressantes. Parti du Kennedy Space Center le vendredi 14 novembre 1969 (soit moins de quatre mois après Apollo-11) et emportant à son bord les astronautes Alan Bean, Charles Conrad et Richard Gordon, Apollo-12 suivit une trajectoire qui, après la dernière modification en vol, avait un périgée plus élevé que celui d’Apollo-11. L’avantage d’une telle trajectoire réside dans l’économie de combustible réalisée, qui permettra, à l’avenir, de modifier le plan de l’orbite circumlunaire et, ainsi, de débarquer en des endroits éloignés de l’équateur lunaire. Le voyage, la mise en orbite lunaire et la séparation du L.M. se passèrent comme prévu. Le L.M., avec C. Conrad et A. Bean à bord, se posa, le mercredi 19 novembre, à quelques mètres seulement de l’endroit prévu (20 97 de latitude S. et 230 45 de longitude O.), près du cratère au bord duquel Surveyor-3 avait atterri deux ans et demi plus tôt. Après avoir revêtu leur scaphandre, Conrad puis Bean descendirent une première fois sur la Lune où ils séjournèrent respectivement 3 h 44 mn et 3 h 1 mn, installant des appareils scientifiques à une centaine de mètres du L.M. et ramassant avec beaucoup de soin des échantillons de sol lunaire. Ils ne purent installer une caméra de télévision qui tomba hors de service, ce qui priva les téléspectateurs de la retransmission des images de leur randonnée. Le lendemain, jeudi 20 novembre, au cours d’une deuxième sortie qui dura 3 h 50 mn, ils continuèrent à choisir des spécimens de roche et de poussière, et se dirigèrent vers Surveyor-3, qu’ils atteignirent après une descente prudente le long des pentes du cratère. Ils prélevèrent certains équipements dont l’étude permettra de connaître l’action prolongée de l’environnement lunaire sur divers matériaux et composants électroniques. Ils rentrèrent à bord du L.M., ayant parcouru, pendant les deux sorties, 1,8 km.

Le départ de la Lune et l’amarrage avec le module de commande resté en orbite s’effectuèrent le jeudi 20. Après séparation, le L.M., remis à feu, alla s’écraser dans l’océan des Tempêtes, à 75 km des installations scientifiques laissées au sol. Le vendredi fut passé à photographier la Lune et, plus particulièrement, les sites retenus pour les futurs débarquements du programme Apollo. Puis la cabine Apollo s’arracha à l’attraction lunaire et revint vers la Terre où l’amerrissage et la récupération dans le Pacifique eurent lieu le lundi 24 novembre.

L’expérience Apollo-12 confirma la valeur du matériel mis au point et apporta quelques nouveautés. Tout d’abord, l’équipement scientifique installé à la surface de la Lune: l’A.L.S.E.P. (Apollo Lunar Surface Experiments Package) comportait, contrairement à celui laissé par Apollo-11 (muni de cellules solaires), une source d’énergie autonome constituée par un générateur nucléaire d’une puissance de 63 watts, contenant 4 kg de combustible radioactif, qui permettra aux appareils de fournir des données pendant le jour et la nuit lunaires. L’A.L.S.E.P. comprenait principalement des détecteurs de vent solaire, d’atmosphère et de poussière (cela pour l’étude de l’environnement); un sismographe et un magnétomètre (pour l’étude de la structure interne de la Lune). Les premières données transmises laissèrent les savants quelque peu perplexes. Le détecteur d’atmosphère indiquait, en effet, une densité de un millionième de celle de la Terre, alors que les spécialistes s’accordaient sur une valeur de un dix milliardième. D’autre part, la chute provoquée du L.M. à la surface de la Lune provoqua des ondes très longues, ayant une faible vitesse de propagation et qui durèrent trente minutes. Les spécialistes entreprirent aussitôt une étude pour interpréter ces caractéristiques curieuses.

Une autre innovation d’Apollo-12 fut les conditions de choix et de prélèvement des échantillons de sol lunaire. En contact avec des géologues au centre de contrôle de Houston, les astronautes décrivirent les spécimens recueillis et photographièrent l’environnement de chacun d’eux. La couche de poussière près du L.M. était beaucoup plus épaisse que lors du débarquement dans la mer de la Tranquillité. Cela n’empêcha pas les astronautes de mener leur mission avec beaucoup de simplicité et de bonne humeur. Ils confirmèrent la grande facilité de déplacement et Conrad, après une chute, put même se relever seul.

Apollo-13, en avril 1970, vit sa mission racourcie à cause d’une explosion dans le module de service. Les astronautes d’Apollo-14 en 1971 déployèrent le deuxième A.L.S.P. et de nouveaux instruments, ceux d’Apollo-15 atterrirent dans une région montagneuse et lancèrent un sous-satellite en orbite lunaire. La Lune fut utilisée comme laboratoire astronomique lors d’Apollo-16; la mission Apollo-17 fut la plus longue, un géologue y participa.

3. Satellites d’applications

On distingue trois types généraux de satellites d’applications: satellites de communications, de surveillance de la Terre, de navigation (tabl. 1). Par coïncidence, le premier de chacune de ces trois séries a été lancé en 1960: Echo-1, satellite passif, réflecteur de communications, le 12 août; Transit, un satellite de navigation de la marine américaine, le 13 avril; et Tiros-1, un satellite d’observation météorologique, le 1er avril.

Au cours des décennies suivantes, les capacités techniques de ces satellites furent améliorées. La vitesse de réalisation et le succès des programmes existants augmentèrent, et une activité croissante est assurée, aussi bien dans les programmes civils que militaires.

Satellites de télécommunications

En décembre 1968, février et mai 1969, la Communications Satellite Corporation (Comsat) mit en orbite synchrone des satellites perfectionnés. Alors que les satellites de communications Early Bird (1965) et Intelsat-2 (1967) pouvaient traiter chacun 240 circuits téléphoniques, les satellites Intelsat-3 fournissaient chacun 1 200 circuits téléphoniques.

La nature d’une orbite synchrone de 35 900 km d’altitude impose une vitesse orbitale égale à la vitesse de rotation de la Terre. Ainsi, un vaisseau placé sur une telle orbite reste apparemment fixe dans l’espace au-dessus d’un point de la Terre. Les satellites Intelsat-3 étaient distribués de telle façon que l’un était au-dessus de l’océan Pacifique, deux au-dessus de l’Atlantique, un autre au-dessus de l’océan Indien. À partir de ces trois points dans l’espace, un réseau de communication réellement global fut réalisé.

Des installations au sol, équipées pour la transmission et la réception, assurent les communications avec ces satellites. En 1968, il y avait de telles stations dans cinq pays européens, en Amérique latine (4), aux États-Unis (6) et au Canada (1). En 1969, dix stations supplémentaires ont été mises en service: deux en Amérique latine, trois dans l’Asie du Pacifique, quatre au Moyen-Orient, une au Maroc et la dernière sur le continent africain.

Le nombre de circuits de téléphone par satellite loués commercialement passa de 73 à la fin de 1966 à 941 à la fin de 1968. Des événements mondiaux, tels les vols Apollo, les jeux Olympiques à Grenoble et à Mexico, furent télévisés et transmis par-dessus l’Atlantique et le Pacifique. En 1968, de telles émissions de télévision représentèrent 666 heures contre 225 en 1967 et 78 en 1966.

Comsat fournit à la N.A.S.A. les communications avec les cabines du programme Apollo d’exploration lunaire, et a permis un service de communications avec les courriers aériens transocéaniques, qui assure ainsi des liaisons grandement améliorées entre les avions et les centres de contrôle.

Le département américain de la Défense renforça ses systèmes de communications par satellite. Des orbites synchrones et des orbites d’altitude plus faible étaient utilisées à la fin des années soixante; 29 stations militaires étaient opérationnelles en 1968. On peut obtenir des communications sûres, soit avec de grandes stations fixes au sol (25 m de diamètre), soit, dans des situations tactiques, avec de petits terminaux rapidement installés.

En 1968, l’U.R.S.S. a placé sur des orbites très elliptiques (480 à 40 000 km), de douze heures de période, dix satellites de communication Molnya qui forment la base du réseau de télévision Orbita couvrant l’Union soviétique. 23 stations au sol sont en service. On pense que quelques-uns des satellites Cosmos placés sur des orbites similaires sont des satellites de communications utilisés à des fins militaires.

En Europe, un consortium groupant la France, la république fédérale d’Allemagne et la Belgique établissait à la fin des années 1960 un programme de lancement de deux satellites de communications, ayant une capacité à peu près égale à celle d’Intelsat-3. L’Organisation européenne de recherche spatiale (E.S.R.O.) étudia la possibilité de construire un satellite de communications qui satisferait aux conditions exigées pour une transmission de programmes télévisés en Europe.

Satellites de surveillance de la Terre

Cette large catégorie comprend des satellites qui, employés initialement pour la simple prise de vues photographiques, accomplissent maintenant de nombreuses autres formes de surveillance de la Terre, à des fins très variées.

Météorologie

Le premier des satellites météorologiques, Tiros, transmettait des photos de la couverture nuageuse, permettant aux météorologistes de suivre, de prévoir et d’analyser les tempêtes. Après une série de lancements de ces satellites par la N.A.S.A., l’Environmental Science Services Administration (E.S.S.A.) du département américain du Commerce prit la responsabilité du programme. À la fin des années 1960, ce système fonctionnait régulièrement, et les renseignements météorologiques étaient à la disposition de tous les pays. Plus de 400 stations de transmission automatique des photographies, situées dans des bureaux météorologiques, obtenaient, des satellites E.S.S.A., des photographies en trois minutes. La surface au sol couverte par ces clichés pris à 1 450 km d’altitude est d’environ 4 400 km2. Certains satellites sont équipés pour pouvoir envoyer un rapport quotidien sur la couverture nuageuse à partir d’un système d’enregistrement vidéo. En 1968, le premier de dix satellites Tiros destinés à la surveillance des conditions atmosphériques fut équipé d’un radiomètre optique. Ce capteur mesure les variations des radiations infrarouges en provenance de la Terre et donne l’image des formations nuageuses à la surface de la Terre; Tiros-8 est le premier satellite à transmission directe.

La N.A.S.A. développait aussi des satellites météorologiques plus perfectionnés dans la série Nimbus. Nimbus-3, lancé en avril 1969, est conçu pour obtenir des sondages verticaux de la température de l’atmosphère. L’instrumentation de Nimbus-6 permet le sondage infrarouge et micro-ondes. Grâce à ces sondages, les météorologistes peuvent tracer une courbe exacte des gradients verticaux de température et d’humidité exactes une semaine à l’avance. Des améliorations permettent de mesurer les variations de ces gradients, pour des prévisions à plus long terme.

L’U.R.S.S. a lancé en 1968 deux vaisseaux spatiaux de la série Cosmos, comprenant des satellites météorologiques, afin d’obtenir des renseignements sur les nuages, et permettant la reconnaissance militaire. Cosmos-144 et Cosmos-156 préparent le lancement d’un nouveau type de satellite météorologique: Meteor en 1969.

Géodésie

Le premier satellite américain ayant des buts géodésique ou cartographique, Geos-1, fut mis sur orbite en 1965. Un autre satellite Geos, lancé en 1968, fournit des renseignements qui permettront de relier entre eux des points précis des masses continentales. On peut obtenir une précision de dix mètres. Des réflecteurs de rayon laser, disposés sur le satellite, fournissent une précision de 1 à 1,5 m dans les mesures. Les tâches des satellites sont: la mesure de la dérive des continents, l’étude des mouvements de marées des masses continentales, la prédiction des tremblements de terre; ils renseignent aussi sur les variations de gravité. De plus, la connaissance précise des localisations des objectifs stratégiques potentiels a une valeur militaire évidente.

Relevé de télédétection

Les remarquables photographies prises par les astronautes pendant les vols Gemini, Apollo-7 et Apollo-9 donnent une vue nouvelle des traits physiques de la surface terrestre. Pour la première fois se révèlent dans leur intégralité les plis et les failles de l’écorce terrestre. De telles observations photographiques sont d’une grande utilité pour détecter des sites probables de prospection de pétrole ou de minerais.

Le repérage des ressources en eau (question de plus en plus importante) est possible à partir de satellites, en dressant une carte des localisations et des importances des bassins hydrographiques, des mouvements des glaciers et de la couverture neigeuse. La photographie en couleurs permet d’établir des corrélations avec les polluants biologiques, chimiques et industriels. Les prises de vue en infrarouge des côtes des océans permettent de localiser le déversement des eaux douces, qu’on peut alors retenir, quand cela est possible, par des réservoirs.

Grâce à des techniques semblables, et en utilisant simultanément des caméras équipées de filtres optiques de définition étroite en longueur d’onde, on peut mettre en évidence les mouvements et mesurer les températures de courants océaniques tels que le Gulf Stream. Comme il y a une relation étroite entre les caractéristiques thermiques de l’océan et la présence du poisson, la connaissance de celles-là peut améliorer l’efficacité des flottes de pêche. De telles techniques permettront peut-être même de déceler les bancs de poissons.

Les images transmises de l’espace aident également à établir la carte des routes de navigation dans les eaux côtières et dans les zones de bas fonds, et à contrôler l’envasement des grands ports et des rivières navigables. La surveillance à partir de l’espace fournit des renseignements qu’il est impossible d’obtenir par les seules techniques de mesure au sol.

Un autre domaine où il peut être fait usage de la photographie spatiale est l’agriculture. Elle permet d’identifier les sols arables et ceux qui ne conviennent pas aux cultures en raison d’une salinité excessive. La photographie en infrarouge, grâce à des faibles variations de couleurs indétectables de près, révèle aussi bien l’existence et la propagation d’insectes nuisibles que les maladies des plantes.

L’utilisation de l’informatique jointe à la surveillance des zones agricoles a de multiples applications: recensement des récoltes, prédictions sur les futurs rendements, action immédiate pour prévenir la propagation des maladies des arbres et des plantes, établissement des nécessités d’irrigation, permettant ainsi une planification améliorée, détection des feux de forêt dans les grandes régions forestières, etc.

Le fonctionnement des composants et des sous-systèmes placés à bord des satellites de la série Application Technology Satellite (A.T.S.) de la N.A.S.A., à bord de Nimbus et d’autres vaisseaux spatiaux, a montré la possibilité de telles applications.

Applications militaires

Les forces militaires des États-Unis et de l’Union soviétique ont activement procédé à la surveillance de la Terre depuis l’espace. De tels programmes restent, bien entendu, secrets. On sait cependant qu’on a obtenu des photographies d’une très grande résolution d’objectifs d’intérêt militaire tels que les sites de lancement des missiles balistiques. On récupère les photographies dans des paquets qui, sur commande, sont ramenés sur Terre. Les possibilités de ce système de reconnaissance optique sont remarquables. Un système datant de 1963, techniquement dépassé, employait un objectif de 6,10 m de distance focale et d’une longueur de moins de 1,20 m, capable, dans les meilleures conditions, de détecter des objets de 30 cm de large à une distance de 160 km.

L’utilisation militaire de bandes étroites du spectre électromagnétique permet de détecter et suivre les navires et les mouvements militaires. Les techniques à infrarouge sont employées pour suivre les sous-marins par détection du sillage thermique. La présentation des résultats utilise un fort contraste et les techniques de fausses couleurs.

En 1968, l’U.R.S.S. a accéléré son programme de reconnaissance militaire. Après 1975, le nombre de lancements annuel reste constant: 35 lancements. De plus, le temps de vie utile des appareils en orbite a été prolongé.

Satellites de navigation

Cette classe spécialisée de satellites à usage terrestre, d’abord lancés par la marine américaine en 1960, fut tenue secrète. Le premier but de la série de satellites Transit était de permettre aux sous-marins nucléaires de fixer de façon précise leur position dans toutes les conditions météorologiques. Le système utilisé, essentiellement un phare dans l’espace, a été révélé en 1967. L’utilisation de ce système de navigation par les navires de commerce est d’usage courant au début de 1970. Les applications de Transit concernent également la cartographie et le service du cadastre, la pêche et l’exploration pétrolière.

L’U.R.S.S. a placé sur orbite six satellites de navigation, dans la série Cosmos, en 1968. On suppose qu’ils servaient de repère aussi bien aux sous-marins nucléaires qu’aux navires de surface.

4. Conclusions

Le succès du programme Apollo et des vols Mariner vers Mars et Vénus, entre 1962 et 1972, a démontré clairement que l’homme pouvait explorer l’espace; ce qui semblait incroyable dix ans plus tôt. Alors que les États-Unis et l’U.R.S.S. s’étaient engagés dans une course à l’espace – sinon formellement déclarée, du moins réelle –, les réalisations des programmes Apollo et Mariner constituaient une nette victoire américaine. Comme le programme soviétique n’était pas annoncé à l’avance, sauf en termes généraux, on ne pouvait qu’émettre des hypothèses sur la forme qu’il prendrait.

La tendance du programme américain n’était pas encore bien définie après ces expériences. En riposte à des arguments solides, selon lesquels, le programme Apollo étant réalisé, on pourrait étaler les autres vols d’exploration lunaire, certains avançaient l’idée qu’il serait plus économique d’affecter, en plus grande proportion, les fonds de la N.A.S.A. à des programmes de vaisseaux automatiques plutôt qu’à des vaisseaux habités. En dépit des bénéfices énormes que l’industrie et la technologie américaine ont tirés de la mise au point et de la construction de vaisseaux fiables, certains exprimaient également l’idée que le budget consacré au programme spatial pourrait être réduit pour porter remède aux problèmes urgents de la pauvreté, du logement et de la pollution des milieux naturels.

La réduction de l’effort spatial en dessous d’un certain niveau entraînerait la mise en veilleuse ou le démantèlement d’une puissante équipe expérimentée de savants, d’ingénieurs et d’administrateurs.

Les développements ultérieurs de la conquête spatiale font l’objet d’un chapitre séparé, car on peut considérer que la « période héroïque » a pris fin avec les premiers pas de l’homme sur la Lune.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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